Recommandé électronique : quelle valeur juridique ? - Unlatch

Recommandé électronique, quelle valeur juridique ?

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Laura Meyet
Juriste chez unlatch
7 janvier 2020
IMMOBILIER
recommande electronique lre

Vous souhaitez opter pour le recommandé électronique mais vous ne connaissez pas sa valeur sur le plan juridique ? Pas de panique, Unlatch fait le point pour vous aider.

La loi n°2000-230 du 13 mars 2000 attribue une valeur juridique aux écrits électroniques en transposant la directive européenne 1999/93/CE. Cette dernière prévoit que l'écrit électronique bénéficie de la même force probante que l'écrit sur support papier.

Par ailleurs, l'article 1316-1 du Code Civil dispose que : "L'écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité".

Ainsi, la signature électronique, ou le recommandé électronique sont valables juridiquement dès lors qu'ils répondent à certaines conditions.

C'est le Code des postes et des communications électroniques (CPCE) qui vient fixer les règles en la matière.

Définition d'une lettre recommandée électronique (LRE)

Le décret du 9 mai 2018 relatif à la lettre recommandée électronique définit ce qu'est un recommandé électronique. En effet, il précise qu'il s'agit d'un envoi en recommandé électronique au sens de l'article L.100 du code des postes et des communications électroniques.

Cet article prévoit que : " L'envoi recommandé électronique est équivalent à l'envoi par lettre recommandée, dès lors qu'il satisfait aux exigences de l'article 44 du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l'identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/CE".

Ainsi, dès lors que les conditions posées par l'article 44 du Règlement n°910/2014 sont respectées, le recommandé électronique a la même valeur que le recommandé classique.

Concrètement, comment cela fonctionne ? L'expéditeur décide de passer par une plateforme dématérialisant la procédure du recommandé. Le destinataire sera informé par l'opérateur de la plateforme qui l'invitera par la suite à se connecter pour en prendre connaissance. Bien entendu, un choix sera laissé au destinataire qui choisira si oui, ou non il souhaite prendre connaissance de ce recommandé.

La source juridique encadrant le recommandé électronique

La valeur juridique du recommandé

La valeur juridique du recommandé classique et du recommandé électronique est la même. En effet, pour être valable au niveau juridique, plusieurs conditions doivent être respectées :

  • le prestataire en charge de l'acheminement doit garantir l'identité du destinataire et de l'expéditeur
  • les dates d'expédition et de réception doivent être garanties et vérifiables
  • si le destinataire n'est pas un professionnel, son consentement doit avoir été préalablement obtenu

L'opérateur de la plateforme en charge de la délivrance du recommandé électronique doit fournir à l'expéditeur une preuve de dépôt électronique que ce dernier devra conserver pour une durée minimum d'un an.

La forme de la LRE

Selon l'article L.100 du CPCE, le recommandé électronique peut être valable au niveau juridique qu'il se fasse via un support papier ou un support électronique.

Il s'agit là des deux supports admis pour le recommandé.

L'écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier.

Un non-respect des exigences posées par l'article L.100 du CPCE peut valoir une amende de 50 000€. En effet, selon l'article L.101 du CPCE, le fait de proposer ou fournir un service qui ne remplit pas les exigences de l'article L.100 du CPCE, notamment en induisant en erreur l'expéditeur ou le destinataire sur les effets juridiques de l'envoi est puni d'une amende.

Les nouvelles dispositions en date du 1er Janvier 2019

Le décret du 9 mai 2018 relatif à la lettre recommandé électronique est venu fixer de nouvelles dispositions qui sont entrées en vigueur depuis le 1er Janvier 2019.

L'identité respective de l'expéditeur et destinataire

L'article R.53-1 du CPCE dispose que "La vérification initiale de l'identité de l'expéditeur est réalisée par l'une des modalités prévues aux points a, b, c ou d du paragraphe 1 de l'article 24 du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l'identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/ CE".

De même, il ajoute que "La vérification initiale de l'identité du destinataire doit être assurée au minimum dans les conditions prévues, pour le niveau de garantie substantiel, au point 2.1. de l'annexe du règlement d'exécution (UE) 2015/1502 de la Commission du 8 septembre 2015 fixant les spécifications techniques et procédures minimales relatives aux niveaux de garantie des moyens d'identification électronique visés à l'article 8, paragraphe 3, du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil sur l'identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur".

Ainsi, il est possible d'admettre que la vérification initiale de l'identité de l'expéditeur et du destinataire au moment de l'envoi devra être effectuée par un tiers opérateur (plateforme en charge de l'envoi du recommandé) selon les modalités issues de l'article 24 du Règlement elDAS, lequel prévoit que l'identification peut se faire :

  • Soit par la présence en personne de la personne physique ou morale du représentant
  • Soit à distance à l'aide de moyens d'identification électronique
  • Soit au moyen d'un certificat de signature électronique qualifié ou d'un cachet électronique qualifié
  • Soit à l'aide d'autres méthodes d'identification reconnues au niveau national qui fournissent une garantie de sécurité et fiabilité

La preuve du dépôt du recommandé

Aux termes de l'article 53-2 du CPCE, le tiers opérateurs devra fournir au destinataire une preuve de dépôt électronique que ce dernier devra conserver pendant une durée minimum d'un an.

Bien entendu, des mentions obligatoires devront figurer sur la preuve notamment le nom/prénom de l'expéditeur ainsi que ceux du destinataire ; raison sociale de l'expéditeur et du destinataire ; adresse électronique ; numéro d'identification d'envoi ; la date et heure de l'envoi indiquées par l'horodatage électronique qualifié ; et enfin, la signature électronique avancée ou le cachet électronique avancé.

La notification au destinataire

L'article 53-3 du CPCE impose au tiers opérateur la notification au destinataire, par voie électronique, qu'un recommandé électronique lui est adressé. Cette notification ne doit pas révéler l'identité de l'expéditeur et doit lui laisser le choix d'accepter ou de refuser ce recommandé électronique dans un délai de 15 jours à compter du lendemain de l'envoi de la notification.

Cette notification ne doit pas révéler l'identité de l'expéditeur et doit lui laisser le choix d'accepter ou de refuser ce recommandé électronique.

Acceptation ou refus du recommandé électronique par le destinataire

Egalement, aux termes de l'article R53-3.I du CPCE, le destinataire a le choix : accepter ou refuser le recommandé électronique qui lui a été notifié. Selon le choix fait par ce dernier, les conséquences qui en découlent seront différentes.

  • S'il accepte le recommandé : le tiers opérateur procédera à la transmission du recommandé électronique au destinataire et révélera donc l'identité de l'expéditeur, qui recevra une confirmation de réception.
  • S'il refuse le recommandé : le tiers opérateur mettra à disposition de l'expéditeur une preuve de refus ou de non-réclamation, au plus tard le lendemain de l'expiration du délai de 15 jours.

Les preuves d'acceptation, de refus ou de non-réclamation devront comporter les mentions obligatoires telles que l'heure et la date indiquées par un horodatage électronique puis être conservées par le prestataire de service pendant une durée minimale d'un an.

Les règles d'indemnisation

Le tiers opérateur peut voir sa responsabilité engagée en cas de perte de données ou retard.

En effet, la plateforme est tenue de respecter les règles de sécurité relatives aux traitements de données et éviter toute divulgation ou perte.

Dès lors qu'elle se trouve dans ce cas de figure, des indemnités sont susceptibles d'être mises à sa charge mais elles ne peuvent excéder 16 euros selon l'article R2-1 du CPCE.

Que se passe t-il en cas de litige ?

Le destinataire d'un recommandé électronique ne pourra contester la notification de ce dernier si l'ensemble des conditions ont été respectées.

En effet, l'expéditeur pourra prouver l'envoi selon les différents moyens de preuve existants :

  • Preuve de dépôt et d'envoi : contient l'heure et date par un horodatage électronique
  • Preuve selon le comportement du destinataire

o   accusé de réception (prouvant l'acceptation du recommandé)

o   refus du recommandé par le destinataire

o   négligence du destinataire (délai de 15 jours non respecté)

Jurisprudence et recommandé électronique

La loi française a procédé, dans sa jurisprudence, à la reconnaissance du recommandé électronique en matière contractuelle.

En effet, la Cour d'appel de Paris a jugé valide la notification de la rétractation exercée dans le cadre d'une vente immobilière suite à l'envoi d'une lettre recommandée électronique (Cour d'Appel de Paris, 17 juin 2016 n°15/01954).

La Cour a donc affirmé que le recommandé électronique était un moyen valide de notification.

Foire aux questions sur le recommandé :

  • Quelle est la différence entre recommandé électronique et mail ?

A la différence du mail, le recommandé électronique certifie la réception du courrier par le destinataire. En effet, même si l'email est horodaté, cela n'est pas suffisant sur le plan légal.

La force probante de l'email n'existe qu'au regard de l'envoi et non de la réception et il s'agit là de la principal différence avec le recommandé électronique qui dispose d'une force probante à la réception.

Il est tout à fait possible que, dans le cadre du mail, le destinataire ne choisisse par l'option "accusé de réception" ce qui peut compliquer la situation.

Il n'y a donc que le recommandé électronique qui constitue une solution fiable au niveau juridique.

  • Quels sont les avantages / inconvénients du recommandé électronique ?

L'usage d'un recommandé électronique présente plusieurs avantages notamment en matière de preuve du contenu garantissant une fiabilité juridique ;  un gain de temps , un coût inférieur aux frais d'envoi papier notamment concernant l'encre, le papier, les enveloppes. Toutefois, l'une de ses limites porte sur les frais d'envois qui coûtent plus cher que les frais d'envois papier.

  • Dans quels cas utiliser le recommandé électronique ?

Le recommandé électronique peut être choisi pour n'importe quel secteur du droit ou de la vie courante.

Il est reconnu pour sa fiabilité juridique notamment pour reconnaître l'existence d'un droit ou d'une preuve. Il est donc possible d'utiliser cette alternative pour établir des actes de tous les jours.

Par exemple, notre société Unlatch, créée en 2018, a mis en place une solution permettant aux promoteurs immobiliers de dématérialiser leur processus de vente immobilière en VEFA.

En effet, le promoteur peut faire signer un contrat de réservation électronique, mais également notifier le délai de rétractation (délai SRU) dont dispose les acheteurs par recommandé électronique. Cette procédure profite de plus en plus aux promoteurs qui gagnent un temps inestimable au niveau administratif. De même, elle constitue un service pratique pour l'acheteur qui n'a plus besoin de se déplacer en bureau de Poste. 

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Laura Meyet
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